Espaces Magnétiques: Octopus, la pieuvre de Decouflé & Corps à corps, à partir de Decouflé sur Canal +

samedi 22 janvier 2011

Octopus, la pieuvre de Decouflé & Corps à corps, à partir de Decouflé sur Canal +

OCTOPUS

Philippe Decouflé présente sa dernière chorégraphie, Octopus, comme « un opus pour huit danseurs, (...) et il y a à peu près huit parties », ajoutant : « J'ai travaillé sur la sensualité, (...) sur ce qui pour moi est beau, c'est-à-dire une beauté un peu différente...». Contre un monde de plus en plus rapide et violent, où nous sommes confrontés à une masse d'information énorme, il entend proposer « quelque chose de calme, de doux, de beau » (1).

Mais, à vrai dire, la pièce est comme son titre, susceptible de deux lectures. En surface, Octopus affiche ses rondeurs en "o". Mais la traduction de l'anglais signifie bien "Pieuvre", animal inquiétant sinon terrifiant des profondeurs (de l'inconscient ?).

La création marque un tournant dans la carrière du chorégraphe. Pour deux raisons : il y est question très fortement de sexe et de mort. Côté sexe, la pièce suit un séjour de Decouflé au Crazy Horse, où il a créé Désirs en 2009, et qui l'a désinhibé. Le "gentil" chorégraphe (nous écrivons cela sans aucune ironie) devient un chorégraphe sexué, sinon membré. Pour la mort, il s'en explique franchement dans une interview à BFM TV : « Je vais avoir 50 ans bientôt, mes parents sont proches... de la mort, c'est quelque chose qui commence à être présent dans ma vie, donc c'est comme tout, il faut travailler dessus, donc, moi, plutôt que d'aller voir un psy, je fais des spectacles (écarquillant les yeux) ! » Cependant, on peut penser que l'un n'exclut pas l'autre.

Le résultat est plutôt de qualité, mais il est possible de faire certaines réserves. D'une part, les (états de) corps sont vraiment trop lisses, trop propres, comme "lessivés". La musique et le chant créés pour l'occasion en direct par Labyala Nosfell et Pierre Le Bourgeois apportent un peps qui manquerait sinon. Cela dit, Decouflé explique qu'« il faut qu'on ait l'impression qu'il manque quelque chose dans la musique et dans la danse pour qu'un danseur puisse devenir un instrument [de musique] soliste et qu'un corps de ballet puisse devenir un groove derrière un solo d'instrument » (2). Par ailleurs, si l'on peut être impressionné par certaines scènes pendant la représentation, on peut aussi remarquer l'oubli qui frappe après. Decouflé explique : « Mon métier, c'est de faire du divertissement, si possible de bon goût » (3). Mais la définition du divertissement n'est-il pas ce qui s'efface assez vite, même si cela occupe la conscience ? Et se définir ainsi, n'est-ce pas se tenir soigneusement à distance de tous ses collègues de la danse contemporaine ? Pourquoi ne pas assumer qu'on fait de l'Art, comme un cinéaste ou un peintre ? Enfin, sans être pudibond, et contrairement à Chaillot, nous ne pensons pas que ce spectacle s'adresse à des enfants « à partir de : 8 ans ». Réservons le SM chic, tendance manga japonais, à la majorité sexuelle, sinon plus : 17 ans ?

CORPS À CORPS (MENSOMADAIRE, CANAL +)

Le magazine Mensomadaire, qui officie sur Canal +, a la bonne idée de saisir l'occasion de la venue à Paris de Decouflé, pour consacrer un numéro entier — soit 30 minutes — au corps. Nous avons un corps qui ne demande qu'à frétiller, affirme l'émission, drôlement et justement. Treize minutes concernent Decouflé, mais on trouve d'autres invités. Ainsi Halory Goerger avec Bonjour concert, spirituelle discussion entre « un concert de rock », très sympa, et « un spectacle de danse contemporaine », très spécial (et très réaliste, même si il ne représente pas toute la danse contemporaine). René's World - Physiques, de Renaud Jaillette, est une féérie hallucinée (voir photo ci-dessous). Striptease volcanique, de Régine Ciroteau, propose comme son nom l'indique un stiptease, mais intersidéral, et lui aussi halluciné. Le tout, on l'aura compris, est réjouissant.

(1) Pour ce paragraphe, les propos viennent d'une interview sur France 2 avec Elise Lucet, le 3 janvier 2011, qu'on peut visionner plus bas dans l'article.
(2) Propos tenus dans le reportage de Mensomadaire, « Corps à corps », Canal +.
(3) Interview sur France 2 avec Elise Lucet, le 3 janvier 2011.

▶ Octopus , de Philippe Decouflé - Cie DCA, Théâtre national de Chaillot, du 5 janvier au 4 février,
puis Tournée (cf. ci-dessous; et sur le site de la compagnie, cliquer sur LA COMPAGNIE puis sur Où et Quand ? www.cie-dca.com/).
TV DCA /

▶ Mensomadaire - Le magazine des curiosités visuelles : « Corps à corps » (30 minutes), sous l'égide de Philippe Decouflé : Mensomadaire
1 (9 mn.), de Philippe Decouflé (duo d'Alice Roland et Sean Patrick Mombruno), musique Where Did you Sleep Last Night de Ledbetter Huddie (alias Lead Belly; version originale, et interprétée par Labyala Nosfell et Pierre Le Bourgeois)
Bonjour Concert. une campagne de publicité comparative (2mn.20s), de Halory Goerger, avec Arnaud Boulogne et Halory Goerger, Tous les épisodes
René's World - Physiques (2mn.), réalisation et musique de Renaud Jaillette (www.myspace.com/renaudjaillette), conçu dans le cadre de l'École supérieure d'arts et médias de Caen (www.esamcaen.fr/),
Striptease Volcanique (10 mn.), de Régine Ciroteau.
Diffusion : Canal + lundi 24 janvier à 23h35. Puis, Canal + Cinéma mardi 25 janvier à 20h11 et mercredi 26 janvier à 0h25. Enfin, Canal + Décalé le jeudi 27 janvier à 6h34.

www.canalplus.fr/ /

TOURNÉE d'OCTOPUS (extrait)

4 et 5 juin : Salamanca (Espagne), FACYL
15 - 17 juin : Nantes, Le Lieu Unique
30 juin - 3 juillet : Barcelone (Espagne), Teatre Nacional de Catalunya
21 - 24 septembre : Turin (Italie), Festival TorinoDanza
4 - 8 octobre : Aix-en-Provence, Grand Théâtre d’Aix
12 - 23 octobre : Lyon - Maison de la Danse
17 - 19 novembre : Antwerpern (Belgique), De Singel
1 - 2 décembre : Valence, Comédie de Valence

▼ Philippe Decouflé invité du Journal Télévisé de 13 heures de France 2,

le 3 janvier 2011. Il est interrogé par Elise Lucet (durée : 6 minutes et 45 secondes)

↳ Suite : Philippe Decouflé répond aux questions d'internautes Ici

▼ Reportage sur France 3, janvier 2011 (durée : 1 minute et 53 secondes)