Le gouvernement veut imposer une nouvelle négociation dans le domaine de l'assurance-chômage pour aboutir à une forte baisse générale des allocations chômage de presque 4 milliards sur 3 ans. Pour les intermittents du spectacle une économie de 100 millions par an est exigée.
L'acteur Samuel Churin (photo), une figure importante de la lutte pour la défense des droits des intermitents du spectacle, vient de publier le 29 novembre sur sa page Facebook un texte que nous publions dans son intégralité ci-dessous. Pour aider à sa lecture nous avons mis en forme et en couleurs certains passages.
Par ailleurs, sur cette question, on peut lire une interview de représentants syndicaux (dans L'Humanité, ICI) et les articles des quotidiens Libération (ICI) et Le Monde (ICI).
En région parisienne une AG est prévue à l'appel de la CGT Spectacle le lundi 10 décembre à 19h au Théâtre national de la Colline (15 Rue Malte Brun, 20° arrondissement).
Fabien Rivière
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Résumé et perspectives
Cela faisait bien longtemps que je ne m’étais pas exprimé sur la question de l’assurance chômage et il est temps de reprendre du service. Le répit pour les intermittents aura été de courte durée mais nous y sommes hélas habitués.
Que s’est-il passé depuis la signature à l’unanimité de l’accord de 2016 ?
Celui-ci a été appliqué. C’est un accord redistributif qui a permis de sauver au moins 6000 intermittents par an et qui a mis fin à de nombreuses ruptures de droits temporaires. En effet, la recherche de droits sur 10 mois ou 10 mois ½ avait engendré de nombreuses ruptures de droits. Non pas des techniciens ou artistes qui sortaient définitivement de l’indemnisation, mais qui ne cessaient de sortir de l’indemnisation pendant plusieurs mois avant de « refaire » leurs heures. Les premiers résultats sont clairs : l’accord de 2016 a « sauvé » les plus pauvres. Certes la nouvelle franchise sur les congés spectacle (franchise obligatoire imposée par la loi) a limité le nombre d’indemnités pour celles et ceux qui travaillent beaucoup, mais sachez que l’aspect redistributif de l’accord de 2016 est effectif. De fait il impacte les moins précaires pour redonner aux plus pauvres. Pour rappel, la date anniversaire est flottante comme avant 2003. Pour ouvrir des droits sur 12 mois lors d’une réadmission, déclarer une journée de travail la veille de votre date anniversaire ou peu de temps avant. Certains parleront de magouilles ou de triche. A cela je réponds que la date anniversaire flottante est un piège, qu’elle est aberrante, inadaptée à nos pratiques d’emploi, que ce qui n’est pas vertueux doit être détourné.
Que s’est-il passé depuis l’élection de Macron ?
La part salariale des cotisations sociales pour l’assurance chômage a été supprimée pour l’ensemble des travailleurs du privé SAUF pour les intermittents du spectacle. En effet ces cotisations avaient été doublées pour notre secteur. Elles étaient de 4,8 % contre 2,4% pour le reste des salariés du privé. Nous sommes donc passés à 2,4% et elles sont de zéro pour l’ensemble des salariés. En contrepartie, la CSG a été augmentée. Pour rappel la CSG est payée par tout le monde, y compris par les fonctionnaires et retraités. Contrairement aux cotisations sur les salaires, la CSG est un impôt. Les recettes de l’assurance chômage sont donc constituées de :
- Cotisations patronales pour tous les travailleurs du secteur privé
- Cotisations salariales uniquement pour les intermittents du spectacle
- CSG payée par tous
Outre le fait que les recettes ne sont pas constituées de la même manière, les conséquences sont importantes pour le « pilotage » des accords Unedic : Il ne s’agit plus d’une gestion paritaire entre syndicats de salariés et syndicats de patrons, mais d’une tripartite. L’impôt abondant les recettes, l’état est partie intégrante de la négociation. Il l’était de fait avant, mais en coulisse. Maintenant, il l’est officiellement. Ainsi c’est l’état qui donne sa feuille de route en premier, et les syndicats sont sensés l’appliquer. Et avec un état libéral, le Medef aura beau jeu de dire : nous ne faisons que répondre aux injonctions de Macron.
Quelles sont ces injonctions ?
L’état demande 3 à 3,9 milliards s’euros d’économies sur 3 ans soit de 1 à 1,3 milliards d’euros par an sur l’assurance chômage en général, autrement dit sur le dos des chômeurs. Inutile de vous dire que le Medef va se faire un plaisir d’imposer cette lettre de cadrage. D’habitude c’est eux qui la rédigent. Faire des économies sur le dos des chômeurs, c’est obscène, tout le monde sera d’accord. Mais il y a pire dans les injonctions de Macron. Et le pire, c’est le fléchage. Car le gouvernement ne se contente pas de donner un objectif économique global, il indique où prendre l’argent. Résultat : tout comme pour sa réforme fiscale, les économies sur l’assurance chômage ne sont pas demandées aux plus « riches », mais EXCLUSIVEMENT aux plus pauvres. En effet, l’état indique que ce qui doit diminuer sont les indemnités versées aux travailleurs précaires. Autrement dit à TOUS LES INTERMITTENTS DE L’EMPLOI. Toutes celles et ceux qui ont des petits boulots à temps partiels vont se faire massacrer. Et nous en faisons partie évidemment. En cela Macron est tout à fait cohérent : on taxe les classes moyennes et les pauvres, on enrichit les plus aisés, le ruissellement fera le reste !!
Quelles conséquences pour les seuls intermittents du spectacle ?
Le Medef a rendu une jolie copie hier mercredi 28 novembre lors d’une journée de « négociations ». Cette copie a été distribuée à tous les syndicats de salariés. Denis Gravouil (négociateur pour la CGT et à la tête de la CGT spectacle) en a fait un résumé détaillé. En clair le MEDEF applique aux intermittents du spectacle la feuille de route de l’Etat et estime que notre secteur doit réaliser 100 millions d’euros par an d’économies !
Autrement dit, si ces économies sont réalisées, on est tout proche de la disparition de l’intermittence.
Que pouvons-nous faire ?
Nous réunir, nous organiser et nous défendre.
Avant que l’Etat et le Medef tentent une nouvelle fois de faire disparaitre le dernier régime spécifique d’assurance chômage qui couvre l’emploi précaire, autrement dit le dernier régime pensé pour assurer une continuité de revenus sur une discontinuité d’emplois, avant que nos vies soient directement impactées, nous devons lancer un signal fort :
NOUS N’ACCEPTERONS AUCUNE ECONOMIE
Et non seulement nous ne devons pas accepter d’économies supplémentaires, mais nous devons revendiquer : UNE ASSURANCE CHOMAGE DIGNE POUR TOUTES ET TOUS.
En ce qui concerne les intermittents, l’accord de 2016 peut être rediscuté, mais uniquement dans le but d’être amélioré.
Macron dans son programme réclamait plus de flexibilité en assurant qu’il n’allait pas oublier la sécurité liée à cette flexibilité. Non seulement il l’oublie, mais il fait pire : il tente de détruire le peu de sécurité qui était accordée aux plus fragiles.
Qu’il sache que nous ne laisserons rien passer, qu’il nous aura sur sa route.
Jusqu’alors, l’Etat était un interlocuteur. Auparavant, c’était un jeu de dupes. Le ministère des affaires sociales voulait des économies, le ministère de la culture se disait de notre côté et tentait mollement de nous défendre. Pour la toute première fois, le nouveau ministre Franck Riester a décidé de nous ignorer en ne nommant pas de conseiller aux affaires sociales à son cabinet. Autrement dit, nous n’avons plus d’interlocuteur. Dont acte. Ils ne veulent pas discuter, AGISSONS.
La CGT appelle à la manifestation samedi 1er décembre Place de la République à Paris sur le chômage, la précarité et la hausse des salaires.
Pour les intermittents, il est essentiel que des AG s’organisent partout.
Demandez aux théâtres de vos régions. Organisons nous.
Pour les franciliens, à l’appel de la CGT spectacle :
AG AU THEATRE NATIONAL DE LA COLLINE
LUNDI 10 DECEMBRE 19 H
SOYONS NOMBREUX PARTOUT
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