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Pièce d'ensemble, d'Alma Söderberg, Photo Fabien Rivière |
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L'Atelier de Paris à La Cartoucherie, le samedi 10 juin dans le cadre de la 17° édition du festival de danse June Events, consacrait un programme à La Manufacture - Haute école des arts de la scène à Lausanne (Suisse), plus précisément un « Spectacle de fin d'études / Bachelor en Contemporary Dance 2023 » [« promotion F »] selon le dossier de presse. Intitulé anglais dans une Suisse francophone.
Comment rendre compte du projet d'une école, en l'espèce de deux créations ? Faut-il le juger ? Faut-il être « Gentil » et donc aimé de toutes et tous (contre l'affreux « Méchant ») ?
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Saluts à l'issue de Pièce d'ensemble, d'Alma Söderberg, Photo Fabien Rivière |
La suédoise Alma Söderberg présente Pièce d'ensemble, pour 11 interprètes, qui travaille principalement les relations entre voix et corps, dans une scénographie épurée qui suggère une église. Des onomatopées déclamées rythmiquement. On entend, à tort ou à raison, successivement, ceci : cyclope - chi-chop - si-sop - sif-hop - etc. Et aussi : « Regarde plus près », « Regarde de plus près », « Avec moi », etc.
Sans doute seul compte ici le processus mis en œuvre. Mais il s'en dégage quoiqu'il en soit un sens, qui n'échappe pas à une certaine hystérie, on a même droit à une séquence où une danseuse engueule violemment le public, qui nous fait penser qu'il faut relire ou lire les ouvrages suivants : Les métamorphoses de l'hystérique - Du début de XIXe siècle à la Grande Guerre de Nicole Edelman (La Découverte, 2003), L'invention de l'hystérie au temps des Lumières (1670 - 1820) de Sabine Arnaud (EHESS, 2014), et enfin Les hystériques - En attendant Freud de Jean-Christophe Abramovici (Jérôme Million, 2022).
Pourquoi pas la souffrance, les désordres et la violence, encore faut-il qu'ils soient pensés. II serait question selon la feuille de salle d'« une œuvre qui explore le fait d'être ensemble ». Est-ce à dire qu'être réuni dans une compagnie de danse c'est expérimenter l'église, l'enfermement, et aussi la meute ?
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Les Noces, de Salva Sanchis, Photo Anna Bosch |
Le danseur et chorégraphe espagnol Salva Sanchis propose Les Noces, qui suggère immédiatement... quoi au juste ? La feuille de salle parle de musique, sans plus. On peut rappeler simplement qu'historiquement Les Noces sont des « scènes chorégraphiques russes avec chant et musique » composées par Igor Stravinsky entre 1914 et 1917, mais dont l'instrumentation n'a été achevée qu'en 1923. La création chorégraphique et musicale eut lieu le 13 juin 1923 à Paris au Théâtre de la Gaîté-Lyrique — actuellement nommé La Gaîté Lyrique — par les Ballets russes, sous la direction musicale d'Ernest Ansermet. La chorégraphie en a été confiée à Bronislava Nijinska, alors directrice des Ballets russes. Mais la feuille de salle aussi bien que le dossier de presse ne la mentionnent même pas, participant ainsi à son invisibilisation, justement dénoncée dans un ouvrage récent, La Nijinska: Choreographer of the Modern, de Lynn Garafola, publié le 7 juillet 2022 chez Oxford University Press ICI.
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Couverture de La Nijinska: Choreographer of the Modern, de Lynn Garafola |
Dans le dosssier de presse, on découvre ceci : « Inspiré par les grands thèmes de l'œuvre [de Stravinsky], le chorégraphe (...) propose une partition chorégraphique qui évoque à la fois tradition, famille, liberté, retenue, joie, devoir, répétition, nature, culture, passé, futurisme et féminisme. »
La feuille de salle précise l'enjeu : « être ensemble seuls, être seuls ensemble ». De ce point de vue le résultat est un succès puisque chacun des 11 interprètes, habillés de noir, suit son chemin, à côté des autres, mais isolé, sans qu'il n'y ait jamais ensemble. Mais si l'on n'a pas encore découvert cette affirmation, on remarque que la danse n'est pas vraiment en relation avec la musique (peut-être un peu trop forte), certes très complexe, mais puissamment pulsionnelle, jouissive et lyrique. Une danse raide et froide, qui suit un simple processus. Mais la danse peut-elle n'être que cela ? C'est d'autant plus étonnant que l'on doit à Salva Sanchis et Anne Teresa De Keersmaeker en 2017 un magnifique A Love Supreme ICI, d'après l'album du même nom de John Coltrane, qui lui ne refuse pas le plaisir. Fabien Rivière
TOURNÉE
— Mercat de les Flors, Barcelone (ES) > Ve 2 — Sa 3 juin 2023
— Pavillon de l'ADC Genève (CH) > Me 7 — Je 8 juin 2023
— JUNE EVENTS — festival de l'Atelier de Paris - CDCN (FR) > Sa 10 juin 2023
— Charleroi danse, Bruxelles (BE) > Je 15 — Ve 16 juin 2023
— Théâtre Vidy-Lausanne (CH) > Me 21 — Ve 23 juin 2023
— Théâtre du Jorat, Mézières (CH) - Soirée exceptionnelle avec les vocalistes et les instrumentistes de l'HEMU dirigés par Daniel Reuss > Di 2 juillet 2023
— Tanzhaus Zurich (CH) > Je 6 — Ve 7 juillet 2023
JUNE EVENTS 2023
JUNE EVENTS 2021
ATELIER DE PARIS 2020