vendredi 3 novembre 2023

Le Ballet de Lorraine présente une création de Marco Berrettini, « Songlines »

Vue d'une partie de la scénographie de Songlines de Marco Berrettini, au premier plan,
et de la salle de l'Opéra national de Lorraine, au second, Photo Marco Berrettini
Répétitions de Songlines, de Marco Berrettini, Photo Ronan Muller 
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Le Ballet de Lorraine va présenter une création très attendue du chorégraphe italien né en Allemagne ayant vécu longtemps en France et résidant dorénavant en Suisse à Genève Marco Berrettini, Songlines*, pour 24 interprètes et d'une durée de 45 minutes. 

La scénographie et la lumière sont de Bruno Faucher, un compagnon artistique de longue date. La musique est composée par le compositeur, batteur et réalisateur allemand Daniel Brandt. Programme partagé avec un autre italien, né la même année, 1963, Michele Di Stefano, avec Sierras - danses atmosphériques.  

RDV les mercredi 8, jeudi 9 et vendredi 10 novembre 20h et dimanche 12 novembre 15h, à l'Opéra national de Lorraine, Nancy (département de Meurthe-et-Moselle, région Grand-Est).  En savoir +
Fabien Rivière
* Production dans le cadre du dispositif "Artiste associé" avec le Centre Pompidou-Metz.

  
                          « L’idée pour Songlines m’est venue à la lecture du livre Le chant des pistes de Bruce Chatwin, dans lequel il décrit la vie spirituelle des Aborigènes d’Australie.

L’Australie précoloniale était la dernière masse terrestre sur terre peuplée non pas de bergers, d’agriculteurs ou de citadins, mais de chasseurs-cueilleurs. Leurs labyrinthes de voies invisibles à travers le continent nous sont connus sous le nom de Songlines, mais pour les Aborigènes comme les traces de leurs ancêtres. Le long de ces « routes », ils voyagent afin d’accomplir toutes ces activités qui sont typiquement humaines - chant, danse, mariage, échange d’idées et arrangements des frontières territoriales par accord plutôt que par la force.

Je voudrai transposer dans mon projet les questions que le livre évoque, qui sont archaïques et terriblement actuelles à la fois : pourquoi l’homme est-il le plus agité et le plus insatisfait des animaux ? Pourquoi les errants conçoivent-ils le monde comme parfait alors que les sédentaires essaient toujours de le changer ? Sommes-nous d’accord avec la théorie que tous les problèmes de l’homme proviennent de son incapacité à s’asseoir tranquillement dans une pièce ?

Songlines est une pièce qui tentera de trouver des réponses, à travers la chorégraphie.

Une danse faite dans un espace magique, constitué de champs de force, endroits sacrés et points de lumière, où nos vies extérieures et intérieures ne font qu’Un.»
Marco Berrettini
                                                                                                 

jeudi 2 novembre 2023

Livre - Téo Fdida, un danseur résistant et lucide

Couverture du livre (Téo Fdida, Bretagne, 2021, Photo RitaGo), Photo Fabien Rivière

On donne rarement la parole aux danseurs et danseuses, publiquement. On les entend parfois, accompagnant le-la chorégraphe, quand il-elle rencontre le public à l'issue d'un spectacle. Mais c'est à la discrétion du chorégraphe, et c'est loin d'être automatique. Pourtant ils ont des choses intéressantes à dire, mais, donc, en off. D'autant plus qu'on "oublie" de préciser que beaucoup de matériel chorégraphique est à l'initiative et donc à l'invention des interprètes. 

Ainsi, on découvre avec intérêt de nouveau l'ouvrage du solide cinquantenaire Téo Fdida, Confessions d'un Danseur anonyme sans famille artistique, une réédition chez un autre éditeur disponible depuis le 27 septembre dernier (1ère parution 18 février 2022). Très bonne idée d'avoir ajouté en couverture une belle photo en noir et blanc qui montre notre homme dans une ambiance estivale avec une bouée, pour montrer qu'il n'a jamais coulé ?, du plus bel effet. 

Dans la danse, il faut savoir nager dans un milieu mouvant et imprévisible, avoir du souffle, et résister aux embruns qui menacent à tout moment de vous submerger ? Il ne s'agit pas ici de rêver la danse ni de la théoriser mais de l'éprouver dans sa réalité (où le rêve a sa place). Et de ne pas produire une histoire officielle, ni de se donner le beau rôle. 

Les histoires d'amour finissent mal, en général, chantaient Les Rita Mitsouko. Les histoires d'amitié, c'est un peu la même chose, affirme l'auteur. C'est que, tout à se consacrer à l'Art, avec ce magnifique A, est délaissé un autre art, celui des relations humaines. D'ailleurs, on peut penser à cette reflexion de Dominique Bagouet qui disait un jour qu'il travaillait avant avec « des danseurs » mais qu'il travaillait désormais avec « des êtres humains dansants. » Cela ne concerne donc pas uniquement la formation à donner aux interprètes mais aussi une réflexion à développer sur les modalités de l'être ensemble dans ce milieu violent. 

Qui dit danseur professionnel dit, d'abord, auditions (avant de pouvoir accéder au travail de répétitions, puis à la scène). On vous laisse découvrir combien il déclare en avoir passé. 

Mais avant il y a l'enfance, chapitre savoureux, la passion pour la danse dès 3 ans, et la découverte très tôt de « ce principe de plaisir inhérent au danseur » écrit-il, sans oublier le passage par le conservatoire.

En conclusion il se dépeint comme un « vieux » danseur. Peut-être pour la danse contemporaine (il existe quelques exceptions), mais pas pour les danses populaires, ni le butoh. Se pose aussi la difficulté quand on vient d'un milieu populaire à jouer le jeu codifié que demande cet écosystème qui, bien que "contemporain", fonctionne en partie comme une cour. Bref, on lit avec plaisir un texte fluide et très bien écrit. 
Fabien Rivière
Téo Fdida, Confessions d’un Danseur anonyme sans famille artistique, Roman, Collection Pointe, 92 pages, 15 euros, ISBN 978-2-491991-15-9, ISSN 2427-0067. Editeur  
ACHAT (France) : Librairies indépendantes   

RENCONTRE avec l'auteur :  
Soirée lectures et dédicaces organisée par la librairie La Lucarne des Écrivains, 115 Rue de l'Ourcq, 75019 Paris, le samedi 4 novembre à partir de 19h30 (métro Crimée - ligne 7 ou Rosa Parks - RER E - une station de la gare du Nord - Magenta).

mercredi 1 novembre 2023

Films - colloque - rencontres - performances : «Novembre expérimental #4 : Danses de films»


Paris : du jeudi 16 novembre au jeudi 30 novembre 2023
Films  -  colloque  -  rencontres  -   performances : 
     Novembre expérimental #4 : Danses de films    

« C'est avec grand plaisir que Cinédoc Paris Films Coop présente le programme de Novembre expérimental #4 : Danses de films. Cette année, il est consacré aux Danses de films, un domaine particulièrement prolifique de l’innovation des formes cinématographiques des avant-gardes historiques au cinéma expérimental, avec une pléiade de films qui ont historiquement contribué à renouveler le genre. 

Fidèle à notre politique d’association de la création contemporaine, de l’histoire du cinéma et de de la recherche, la manifestation propose cinq séances exceptionnelles au Reflet Médicis (5° arrondissement) et au Grand Action (5° arrondissement) avec deux hommages aux cinéastes Ed Emshwiller (États-unis, 1925 - 1990) et Pascal Baes (en sa présence). 

Un colloque international aura également lieu sur deux journées, à l’Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis et à l’Institut National d’Histoire de l’Art (2° arrondissement). 

La soirée de clôture au Consulat Voltaire (11° arrondissement, métro Voltaire) présentera un programme de projections ainsi que deux performances danse et film avec la complicité de la Compagnie DCA/ Philippe Decouflé et l’association Braquage

Seront aussi présentés un "Bal blanc" en hommage à Man Ray, dont le public dansant sera l’écran, et une installation interactive inédite par l'artiste Noé Balthazard. »

lundi 30 octobre 2023

La danse des sous-sols d'Alex Baczyński-Jenkins

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C'est au Carreau du Temple à Paris que l'on découvre la pièce du danseur et chorégraphe britannique né en 1987 à Londres Alex Baczyński-JenkinsUntitled (Holding Horizon), en français Sans titre (Horizon de détention), élaborée en 2018 lors de la résidence du collectif féministe queer qu'il a co-fondé à Varsovie, Kem, au Centre d’art contemporain du Château d’Ujazdowski, dans la même ville. 
 
Il a fait partie de la première promotion d'étudiants du Bachelor of Arts « danse, contexte, chorégraphie » du HZT Berlin où Boris Charmatz a enseigné, a été interprète pour Rosalind Crisp, Marlene Monteiro Freitas et surtout Meg Stuart, dans sa compagnie Damaged Goods. Il a signé son premier solo en 2010, Translating the Agony in the Garden, en français Traduire l'agonie dans le jardin

Ce soir la représentation ne se déroule pas dans le théâtre au rez-de-chaussée. On doit emprunter un étroit escalier quelconque, qui peut faire penser que l'action va se dérouler à la cave ou dans un parking. On s'y retrouve bloqué un temps, dix bonnes minutes, avant d'être autorisé à entrer dans la salle. C'est un gymnase, peu éclairé, où l'on observe quatre paniers de basket et au sol des marquages, diverses lignes. On est assis sur des chaises en plastique noires tout autour de la scène, de forme rectangulaire. 

Les cinq interprètes, groupés, sont déjà là. Ils s'avancent, pivotent, puis repartent d'où ils viennent, et ainsi de suite, dans une marche infinie. Le programme indique justement la durée : 3 heures. Mais on peut entrer et sortir quand on veut. Pourquoi pas, mais la pièce a sa cohérence et mérite d'être vue sans discontinuer. 

Sans doute faut-il une période d'adaptation. On est à Paris. Ce soir il pleut. Il fait froid et le métro qui nous a amené était bondé à cette heure. La musique, excellente et jouée live, est un mélange d'électro, de jungle et de musique industrielle, qui pulse, très puissante, et sans doute demande-t-elle une certaine résistance. Il faut s'adapter à ces corps doux sinon sensuels, déliés, qui suggèrent une base de voguing, dans une gestuelle répétitive. Il y a aussi ces bonds, fascinants. 

La proposition est ou serait queer. C'est-à-dire ? En anglais le qualificatif signifie, à l'origine, péjorativement, "étrange", "peu commun" ou "bizarre". Il s'agit de renverser le stigmate, qui devient fierté. Se manifeste aussi la volonté de s'opposer à l'embourgeoisement des gays qui excluent à leur tour, les pauvres, les prostitués, les handicapés, les gays racisés, les "vieux", les "moches", et pourquoi pas les lesbiennes. Ici, on est surtout frappé par les visages que l'on ne voit pas, ce qui est très reposant. En plein narcissisme généralisé, c'est appréciable.

Au bout d'une heure ou d'une heure et demie, on ne sait plus, d'abandon, on reprend ses esprits, du moins en partie, réalisant le sens de cette création : un sous-terrain en Ukraine ou je ne sais où, en tout cas en surface c'est la guerre avec ses bombardements, seul le sous-sol est une protection, on survit, la seule évidence est qu'on est vivant, encore vivant mais pour combien de temps, et la danse manifeste la persistance de la vie et sa puissance d'agir, malgré tout. 
Fabien Rivière
Untitled (Holding Horizon) d'Alex Baczyński-Jenkins, Carreau du Temple (Paris), du 25 au 28 octobre 2023.  En savoir + 

dimanche 29 octobre 2023

Les corps de Katherine Bradford (New York, USA)

Katherine Bradford, Close Swimmers [Nageurs proches],  2023,
acrylic on canvas, 20h x 16w in, 50.80h x 40.64w cm, KBrad_182

Pendant la foire Paris+ organisée depuis un an par Art Basel, de nombreuses autres manifestations ont lieu à Paris. Ainsi, la 9° édition de Paris Internationale (18 - 22 octobre), nomade, cette année dans un bâtiment désaffecté, brut de décoffrage, magnifique au demeurant, sur cinq niveaux, 5.000  d'exposition annoncés, 8.940  au total selon le permis de construire affiché en façade, ancien Central téléphonique Le Cœur, 17 rue du Faubourg Poissonnière, sur Les Grands Boulevards, dans le 9° arrondissement, métro Bonne Nouvelle. On pouvait y découvrir 65 galeries et 5 espaces à but non lucratifs (« non profit spaces ») de 25 pays, une librairie et un café. 

Le bâtiment va devenir... des bureaux, et a été vendu 1/2 milliard, plutôt cher pour certains visiteurs interrogés, mais pas cher pour un (sympathique) galeriste américain à qui on demandait son avis. :) 

La galerie Adams And Ollman, de Portland (USA), côte ouest, présentait le travail de l'américaine Katherine Bradford, 81 ans, née à Houston, dont on aime son attention au corps.  
Fabien Rivière
— Photos : Fabien Rivière 
 Katherine Bradford, Blue Aura Swimmers, 2023, acrylic on canvas,
16h x 20w in, 40.64h x 50.80w cm, KBrad_183
Katherine Bradford, Hovering Women [Femmes planants], 2023, acrylic on canvas,
68h x 80w in, 172.72h x 203.20w cm, KBrad_180